Le burn-out n’est toujours pas reconnu comme une maladie professionnelle. Résultat : un manque de reconnaissance et des défauts d’indemnisation pour les victimes mais aussi des entreprises qui ne sont pas pénalisées pour leur manquement à leur obligation de sécurité (Art L4121-1 du Code du travail). Mais il existe une voie pour faire reconnaître un état consécutif de burn-out en maladie professionnelle.
Le principe : passer par une reconnaissance hors tableau
Le burn-out n’est toujours pas reconnu comme maladie professionnelle car il n’est pas inscrit dans le tableau qui les répertorie. Pourtant, depuis la loi n°2015-994 du 17 août 2015 les maladies psychiques peuvent être reconnues comme maladie professionnelles, mais l’épuisement professionnel n’en fait toujours pas partie.
Ainsi, il faut contourner en se référant à l’Article L461-1 du Code de la sécurité sociale ; il s’agira alors de faire reconnaître les conséquences de votre burn-out : dépression, trouble de l’anxiété, … Le CRRMP (Comité régionale de reconnaissance des maladies professionnelles) décidera alors s’il s’agit d’une maladie professionnelle ou non.
Comment adresser une demande de reconnaissance de maladie professionnelle suite à un burn-out ?
Le salarié doit adresser auprès de la CPAM une demande de reconnaissance de maladie professionnelle. Cela implique d’adresser un certificat médical attestant de la présence et des causes de la maladie, en lien avec le contexte professionnel. La victime devra aussi adresser une déclaration de maladie professionnelle.
Cette demande de reconnaissance doit être adressée dans un délai de deux ans après l’apparition de la maladie : ainsi, pas de panique si votre arrêt maladie était au préalable un arrêt maladie classique ou que votre médecin a d’abord cru à une autre pathologie (ce qui est malheureusement très fréquent avec le burn-out). Le motif de l’arrêt et le formulaire peuvent être modifiés en court d’arrêt.
1/ Adresser une demande de reconnaissance de maladie professionnelle hors tableau
Comme expliqué plus haut, la première étape consiste à envoyer un certificat médical rempli par votre médecin à la CPAM. Votre référent de santé devra décrire précisément votre maladie et son origine. Il vous revient ensuite d’envoyer votre dossier. Conseil : ne vous contentez pas de cette unique pièce. Faites des copies de tous les autres documents qui permettent de rendre compte de votre état de santé.
Pensez à joindre vos ordonnances si vous êtes sous antidépresseurs, anxiolytiques ou somnifères. N’hésitez pas à demander des certificats de suivi aux professionnels de santé que vous avez consultés, qu’il s’agisse d’un médecin psychiatre, d’un psychologue mais aussi d’un sophrologue. Tout document permettant d’établir avec précision votre état et les soins nécessités aidera la CPAM à avoir une image fidèle de votre état et de votre suivi.
Accompagnez votre envoi d’un courrier récapitulant votre demande, les pièces que vous joignez à votre dossier ainsi que le numéro de(s) médecin(s) qui vous suivent.
2/ Répondre aux demandes d’informations de la CPAM
La CPAM entrera ensuite en contact avec vous (soyez vigilant aux courriers et convocations sur le portail en ligne de la CPAM !) et vous demandera certainement des informations complémentaires.
Il peut notamment s’agir de comprendre votre poste, les tâches que vous exécutiez ainsi que vos conditions de travail. Ce document est souvent demandé avant que vous soyez reçu pour une visite médicale auprès d’un médecin conseil de la CPAM.
Ne zappez pas cette étape et donnez un maximum de précisions sur vos conditions de travail (intensité du travail, étendue et régularité des horaires, ambiance, type de management, politique sur les déplacements, les heures supplémentaires, le suivi de votre charge…).
D’autres thématiques comme le niveau de sécurité de votre emploi (menace de licenciements par exemple) ou l’exigence émotionnelle de votre poste (un travailleur au contact quotidien de la mort aura par exemple un risque accru de développer une maladie psychique en lien avec son travail)
3/ Passer une visite médical auprès d’un médecin conseil de la CPAM
Selon la procédure normale, vous serez ensuite convoqué pour une visite médicale dans les locaux de la CPAM. Allez-y détendu, vous ne passez pas un examen ! Les médecins conseil sont pour la plupart parfaitement conscients des réalités du monde du travail. Ils ne sont pas là pour vous tendre des pièges mais simplement pour bien comprendre votre état et l’origine de votre maladie. L’enjeu de cette visite est aussi d’établir votre pourcentage d’incapacité prévisionnelle noté IPP. Si celui-ci est supérieur à 25%, votre dossier sera alors transmis au CRRMP (Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles).
4/ Rencontrer un enquêteur administratif de la CPAM
La CPAM ouvre de façon systématique une enquête administrative – en plus de l’enquête médicale. Elle missionne un enquêteur administratif dont la mission sera de recueillir les informations suivantes : description de votre poste, de vos tâches et de vos conditions de travail et désignation des nuisances physiques ou psychiques auxquelles vous étiez exposé.
Cet enquêteur sollicitera auprès de vous un rendez-vous que vous ne pouvez refuser. Durant cet entretien, il cherchera à reconstituer votre carrière, et à recueillir des informations supplémentaires sur votre poste.
L’enquêteur rencontre aussi systématiquement l’employeur ou un représentant de celui-ci ; il peut aussi demander à rencontrer des collègues de la victime, des délégués du personnel ou des membres du CSE. L’enquêteur peut aussi recueillir l’avis du médecin du travail.
Comment optimiser les chances de reconnaissance
Pour renforcer votre dossier, il peut être intéressant de documenter encore davantage votre état de santé. Ainsi, le suivi via un service de pathologie professionnelle en milieu hospitalier peut permettre de solidifier votre demande tout en vous offrant un suivi médical optimisé. Par ailleurs, établir les impacts cognitifs de votre burn-out est une piste intéressante pour prouver votre état d’épuisement professionnel. Il peut notamment s’agir de réaliser une évaluation neuropsychologique.
Ce qu’une reconnaissance de votre burn-out comme maladie professionnelle peut vous apporter
Se sentir reconnu
La reconnaissance d’un burn-out comme maladie professionnelle est un véritable parcours du combattant mais cette démarche vaut d’être lancée. Elle vous permettra d’une part de vous sentir reconnu ; de nombreuses personnes que nous avions reportent un sentiment de déculpabilisation qui leur permet le plus souvent de guérir plus vite et sans rechute.
Se protéger contre une précarisation possible
Cette reconnaissance est aussi une protection contre une précarisation possible de la victime. En effet, une reconnaissance offre une meilleure indemnisation du travailleur. De plus, si la faute est la conséquence d’une faute dite inexcusable de l’entreprise (elle est reconnue quand il est établi que l’employeur avait ou aurait dû avoir connaissance du risque auquel vous étiez exposé et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour vous en préserver), elle entraîne :
- la réparation intégrale des préjudices subis et non indemnisés par la rente (par exemple : souffrances physiques et morales, préjudices esthétiques et d’agrément, préjudices résultant de la perte ou de la diminution de vos possibilités de promotion professionnelle).
- une majoration de votre rente d’incapacité permanente
Contribuer à sanctionner l’entreprise en question
Enfin, une reconnaissance d’un burn-out comme maladie professionnelle entraîne des sanctions pour l’entreprise. En effet, ce n’est plus à la CPAM de payer vos indemnités journalières mais à l’entreprise qui se voit également attribuer un malus ATMP. Ce qui peut représenter une incitation pour l’entreprise à mettre en place des mesures plus robustes pour assurer la sécurité et la protection de ses employés.
Faire appel si la première décision n’est pas en votre faveur
Vous pouvez contester la décision du CRRMP en saisissant la CRA (Commission du recours amiable). Mais le retour de la CRA est souvent aligné avec celui du CRRMP. Si c’est le cas, vous pouvez ensuite saisir le tribunal de la sécurité sociale qui peut demander la saisine du CRRMP d’une autre région. Ainsi, votre dossier sera examiné par un autre panel d’experts. Pour cette démarche, il est conseillé de vous faire accompagner par un avocat spécialiste de ce type de procédure.
En conclusion
La reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle est une épreuve à laquelle vous devez être préparé. Ne vous lancez dans ces démarches que si vous vous en sentez vraiment la force ou si vous êtes accompagné et conseillé. Et veillez à bien évaluer votre situation avant d’engager ces démarches : une reconnaissance de maladie professionnelle empêche une reconnaissance d’invalidité future si elle porte sur la même maladie. Ainsi si votre burn-out a eu des conséquences physiques directes, une demande d’invalidité peut être préférable car plus protectrice pour vous sur le long terme.
Si vous avez d’autres questions, n’hésitez pas à nous contacter. Notre accompagnement du burn-out à 360° pourra vous aider à diminuer le stress et la charge de ces procédures lourdes.
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